Memento mori

Dans les ruines d'un mur éboulé bordant un chemin creux, perdu, étranger, clandestin, un vieux rosier c'est installé. Torturé, sec, épineux. Une ronce. Nul ne jette un regard sur lui.
Pourtant en ce matin d'automne, à l'aurore, dans ce hallier qui aurait pu cent fois brûler, un miracle vient d'arriver. Le soleil a tout juste éclairé l'horizon. Un bouton, gorgé de rosée, tout doucement s'est éveillé. Il hésite, juste un instant, puis, comme une chrysalide libèrant son papillon, laisse apparaître, dans ces fourrés dépenaillés, une rose. 
Encore timide, froissée et toute étonnée d'exister.
Sous les doux rayons ascendants, elle déplie en s'étirant sa flamboyante robe pourpre.  Passant, il n'y a plus plus de buissons! Ton regard est captif, conquis par sa beauté. Si tu t'appproches son parfum va te pénétrer jusqu'au coeur. Elle se dresse, hautaine, sur sa tige . Dans l'air brûlant de ce midi elle se sait la souveraine.
Elle règne.
Tout doucement le ciel au loin rougit.. Surprise, saisie de frayeur, tandis que sa robe brunit et se frippe, elle courbe lentement sa tige. 
S'en est fini de sa beauté qu'elle voit périr, impuissante.
 Comme elle nous émeut cette rose d'automne qui se fâne et s'étonne de ne pouvoir durer!
Un dernier regard sur ce monde.
Demain les feuilles mortes amortiront sa chute
Alors le vieux rosier retrouvera son camouflage. Il n'attirera plus les yeux du promeneur.
Attendant l'automne prochain.

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L'espace d'un matin...

Octave a écrit:

Pierrot, ne cherche pas de contrepèterie, il n'y en a pas (c'est du moins ce que je crois)

Cueillez dés aujourd’huy les roses de la vie

Pierre de Ronsard

Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise aupres du feu, dévidant & filant,
Direz, chantant mes vers, en vous esmerveillant,
Ronsard me celebroit du temps que j’estois belle.
Lors vous n’aurez servante oyant telle nouvelle,
Desja sous le labeur à demy sommeillant,
Qui au bruit de mon nom ne s’aille resveillant,
Bénissant vostre nom de louange immortelle.
Je seray sous la terre: & fantôme sans os
Par les ombres myrteux je prendray mon repos ;
Vous serez au fouyer une vieille accroupie
Regrettant mon amour & vostre fier desdain.
Vivez, si m’en croyez, n’attendez à demain :
Cueillez dés aujourd’huy les roses de la vie.
Pierre de Ronsard, Sonnets pour Hélène, 1578

Coucou Octave 

grâce à toi je viens de faire un retour en arrière de près de  60 ans 

je me souviens du livre de français LAGARDE ET MICHARD traitant des écrivains et poètes du XVI ° siècle 

il me semble que c'était en 3° 

Jaufré Cantolys a écrit:

Et rose elle a vécu ce que vivent les roses,
L'espace d'un matin...

François de Malherbe  ,et ça aussi ça me rappelle ma jeunesse ( la 4° je crois )

"Enfin Malherbe vint "


Mais ça me rappelle aussi mon service militaire où un EOR (école d'officiers de réserve )sous lieutenant Malherbe 

 me disait 

ENFIN MAHERBE VINT,MAIS QUAND IL S'EN IRA CE SERA ENCORE  MIEUX   

Avez-vous remarqué que si d'Anacréon jusqu'à nos jours, on trouve, par centaines pour ne point dire par milliers des écrivains et des poètes, célèbres et inconnus, bons et mauvais, qui ont écrit sur la rose, il n'y en a guère qui aient parlé du rosier.

Peut-être hors contexte, j'en conviens...

Mais si joli... << Je ne songeais pas à Rose >>
Par le grand chanteur et poète wallon : Julos Beaucarne
musique de Julos Beaucarne sur un poème de Victor Hugo.

Merci Ric pour cette chanson et le poème qu'elle met si bien en valeur

Je ne sais pas si certains parmi nous lisent l'espagnol.
Ce poème de Borges est une merveille!
La traduction propoée est traitresse bien sûr, mais j'espère que vous l'aimerez


La rose

La rose,
la rose immuable que je ne chante pas,
celle qui est la présence et le parfum,
celle du jardin noir en pleine nuit,
celle de tout jardin et de tout après-midi,
la rose qui ressort du crépuscule
cendre pour l'art de l'alchimie,
la rose des Perses et d'Arioste,
celle qui est toujours la seule,
celle qui est toujours la rose des roses,
la jeune fleur platonique,
la rose brûlante et aveugle que je ne chante pas,
la rose inaccessible



[size=34]La rosa[/size]









La rosa,
la inmarcesible rosa que no canto,
la que es peso y fragancia,
la del negro jardín en la alta noche,
la de cualquier jardín y cualquier tarde,
la rosa que resurge de la tenue
ceniza por el arte de la alquimia,
la rosa de los persas y de Ariosto,
la que siempre está sola,
la que siempre es la rosa de las rosas,
la joven flor platónica,
la ardiente y ciega rosa que no canto,
la rosa inalcanzable.

Superbe et bien traduit... Merci du partage...