سيروكو (sirocco)
 
 
Tout puissant, le soleil,
Gigantesque escarboucle,
Ecrase de son feu
Les hommes et les bêtes.
 
Depuis de longs moments
Un silence inquiétant
Enserre dans ses griffes
Toute la caravane.
 
La piste se dilue,
Là-bas, parmi les dunes.
Et aucune oasis
Ne montre sa verdure.
 
Le sable surchauffé
Soulève l’atmosphère,
Et l’air qui brûle et tremble
Abandonne la terre.
 
Les hommes, en cheminant
A l’écart des chameaux,
Evitent la poussière
Que lève leurs sabots.
 
Avertis par le ciel,
Et alertés par l’air,
Ils reçoivent du sol
Les vibrations premières
 
Qui naissent dans les dunes
Quand ailleurs, bien plus loin,
Par-delà l’horizon,
Le vent se mêle au sable,
 
Et, formant une lame,
Il érode la masse
Qui barre son passage
En la faisant frémir.
 
Ces sorciers du désert
Connaissent les prémices.
Et déjà ils blatèrent,
Et veulent baraquer.
 
Les bédouins ont compris
L’agitation des bêtes:
Des heures difficiles
S’annoncent devant eux.
 
On arrête la marche.
On dépose les charges.
Evitant aux chameaux
D’avoir à supporter,
 
En plus de la nature,
Le poids des sacs de sel,
La nourriture et l’eau
Qu’ils portent sur leur dos.
 
Tout est posé au sol
Sur le sable crissant.
L’air commence à peser
Et il faut faire vite.
 
Les chameaux sont déjà
Regroupés. Et ils tendent
Leur tête vers le ciel
En soufflant fortement.
 
Puis ils baraquent enfin.
Ensemble, dos au vent,
En abaissant leur tête
Au creux de leur épaule.
 
Les hommes eux aussi
Ont installé les toiles
Qu’ils ont lesté de sable
Sur tout le bord au vent.
 
Sous elles, seulement
Des guerbas et des dattes.
Les chapelets sont prêts
Pour occuper le temps
 
Et éloigner l’esprit
Des affres du moment.
Et puis le vent s’emporte.
Et le sable crépite.
 
Et les toiles se chargent.
Le sable, qui s’entasse
Dans les creux qui s’affaissent,
Dessinent les contours
 
Des corps ensevelis
Au milieu d’un non-décor.
Car on n’y voit plus rien
A quelques pas de là.
 
Demain, le sirocco
Affrontera l’Atlas.
Le franchira d’un bond.
Et passera la mer
 
Emmenant avec lui
Dans son souffle brûlant,
Les sables du désert
Jusques à l’Occident.

william1941 a écrit:

سيروكو (sirocco)
 
Les chapelets sont prêts
Pour occuper le temps
 
Et éloigner l’esprit
Des affres du moment.

"Alors on reprend la pipe et le chapelet ; on se recommande à la Providence, et l'on attend l'événement."
Itinéraire de Paris à Jérusalem, François-René de Chateaubriand

Quelques heures après la publication de ton poème, l'âme du dernier moine de Tibéhirine s'envolait
au dessus de l'Atlas. Emportée par le Sirocco ??

https://www.leparisien.fr/societe/deces-du-dernier-moine-de-tibehirine-le-frere-jean-pierre-schumacher-21-11-2021-2PK52GNOEJDPTDCRLCDY5JZGNM.php

C'est l'occasion de rappeler que le regretté Pierre Siramy, ancien membre du forum (et ayant dirigé un service
de la DGSE), avait publié un roman portant sur l'histoire tragique de Tibéhirine :
https://www.babelio.com/livres/Siramy-Les-ombres-de-Tibhirine/261866

Sesomiris a écrit:

william1941 a écrit:

سيروكو (sirocco)
 
Les chapelets sont prêts
Pour occuper le temps
 
Et éloigner l’esprit
Des affres du moment.

"Alors on reprend la pipe et le chapelet ; on se recommande à la Providence, et l'on attend l'événement."
Itinéraire de Paris à Jérusalem, François-René de Chateaubriand

Quelques heures après la publication de ton poème, l'âme du dernier moine de Tibéhirine s'envolait
au dessus de l'Atlas. Emportée par le Sirocco ??

https://www.leparisien.fr/societe/deces-du-dernier-moine-de-tibehirine-le-frere-jean-pierre-schumacher-21-11-2021-2PK52GNOEJDPTDCRLCDY5JZGNM.php

C'est l'occasion de rappeler que le regretté Pierre Siramy, ancien membre du forum (et ayant dirigé un service
de la DGSE), avait publié un roman portant sur l'histoire tragique de Tibéhirine :
https://www.babelio.com/livres/Siramy-Les-ombres-de-Tibhirine/261866

Drôle d'histoire que celle de Chateaubriand et du monde arabe.
Il n'y a rien compris parce qu'il rejetait l'Islam sans même savoir ce que c'était.
Il est d'ailleurs régulièrement vilipendé par les lettrés musulman comme un ennemi de l'islam et un raciste. Ce qu'il était incontestablement.
J'ai eu l'ocasion de passer par Tibhirine pendant les années 70 (c'est tout près de Medea et le coin est magnifique)
A l'époque, il n'y avait pas de problème et en fait le monastère n'attirait même pas la curiosité. Il était là. Point, barre.

Il est incontestable que Cervantès avait une meilleure connaissance de l'Islam, et
même des Islams, que Chateaubriand. Mais c'est un peu contraint et forcé qu'il eût
l'opportunité de les découvrir...  

J'ignorais que les lettrés musulmans lisaient Chateaubriand. Voilà qui n'aurait pas
nui à l'ego de ce dernier 

Sesomiris a écrit:

Il est incontestable que Cervantès avait une meilleure connaissance de l'Islam, et
même des Islams, que Chateaubriand. Mais c'est un peu contraint et forcé qu'il eût
l'opportunité de les découvrir...  

J'ignorais que les lettrés musulmans lisaient Chateaubriand. Voilà qui n'aurait pas
nui à l'ego de ce dernier 

Je pense qu'il n'aurait pas aimé leurs appréciations. Ni sur ses écrits, ni sur sa personne.
En fait il est l'un des outils utilisés par les propagandistes anti-occidentaux dans le mond arabo-musulman. 

 "Tous les éléments de la morale et de la société politique sont au fond du christianisme, tous les germes de la destruction sociale sont dans la religion de Mahomet. » (Mémoires d’Outre-tombe, 1828).

De Tocqueville
"J'ai beaucoup étudié le Coran à cause surtout de notre position vis-à-vis des populations musulmanes en Algérie et dans tout l'Orient. Je vous avoue que je suis sorti de cette étude avec la conviction qu'il y avait eu dans le monde, à tout prendre, peu de religions aussi funestes aux hommes que celle de Mahomet. Elle est, à mon sens, la principale cause de la décadence aujourd'hui si visible du monde musulman et quoique moins absurde que le polythéisme antique, ses tendances sociales et politiques étant, à mon avis, infiniment plus à redouter, je la regarde relativement au paganisme lui-même comme une décadence plutôt que comme un progrès»

Gustave Flaubert
"... Je demande, au nom de l’humanité, à ce qu’on broie la Pierre-Noire, pour en jeter les cendres au vent, à ce qu’on détruise La Mecque, et que l’on souille la tombe de Mahomet. Ce serait le moyen de démoraliser le Fanatisme. » (Lettre à Mme Roger des Genettes / 12 ou 19 janvier 1878).

Et de Montaigne à Schopenhauerben passant par Voltaire et Maupassant, ils ont des munitions de premier choix.