Totoche m'a tenu compagnie.
Elle a grognait "Tu devrais leur ficher la paix"
Enfin, c'était plus énergique.
Je ne l'ai pas écouté.
Désolé.
LA FUMEE DE MA PIPE. Hier Lorsque je l’allumais, que venait s’y mêler
L’haleine de la terre par le soc révélée,
Alors flottait dans l’air la volonté des hommes
De garantir la vie pour le prochain automne.
Quand parmi les lavandes j’allais me promener,
Leurs effluves bientôt venaient ensemencer,
Mêlées à la fumée que mon tabac livrait,
Le cours de ma pensée. Et me faisait rêver.
Et souvent les abeilles, affairées, bourdonnantes,
Venaient en ajoutant leurs valses turbulentes
Au soleil, qui du ciel surveillait leur ballet
Créer autour de moi un espace enchanté
En parcourant à l’aube les bancs de la criée
Les odeurs des butins à la mer arrachés
M’emportaient sur les ondes à bord des chalutiers
Voguant sur l’océan pendant des jours entiers
Marchant dans la forêt ma pipe m’apportait
L’exhalaison puissante de l’humus écrasé.
Et les chants des oiseaux faisaient vibrer l’espace,
Orchestre merveilleux me suivant à la trace.
Ma pipe me parlait des hommes, de la vie,
Du travail, de la terre, des rêves inassouvis.
Et les exhalaisons qui troublaient ma fumée
Me parlait seulement de bonheur. Et de paix.
Aujourd’hui La fumée de ma pipe a perdu son odeur.
Et je recherche en vain les anciennes senteurs
La fumée de la poudre porte l’odeur des corps
Et le bruit des combats tue les chants des oiseaux.
Les forêts sont réduites à l’état de bois morts
Et la mer se referme aux coques des bateaux
Plus de fleurs, plus d’abeilles, plus d’’oiseaux, plus de chants
Et l’odeur de la terre éventrée par les bombes
Tue celle que le soc faisait monter des champs.
Pas d’abeille non plus sur les fleurs des tombes
Qu’arrive-t-il sur cette Terre ?
La folie semble avoir saisi le cœur des hommes.