- Oui j’ai vu l’ annonce sur le panneau à l’intersection de l’ancienne grande route, le boulot consiste en quoi et on y gagne quoi ? et est-ce que l’annonce tiens toujours ?
- Tout doux, oui on cherche quelqu’un, on a des bovins et ils faut les garder. Mais d’abord quel est ton nom et tu viens d’où ? demande le vieil homme.
- Ouais tu viens d’où ? » demande un homme sortant de la maison au fond de la cour pour nous rejoindre en m’observant sous toutes les coutures.
Marcel blanc, jean délavé, c’est-à-dire les mêmes fringues que moi, j’avais juste le blouson cuir craquelé fourré et mon sac à dos en plus que ce type d’une vingtaine d’années.
« - Mon nom est Gabe, d’où je viens ? Pour être honnête je ne sais plus et l’endroit où je suis né n’existe sans doute plus, rayé de la carte à ce que j’ai entendu dire… Je cherche un endroit où vivre, parler, échanger quoi.. Le boulot m’intéresse…
- Si tes intentions sont honnêtes, Gabe de je ne sais où, alors tu es le bienvenu… Moi c’est William et lui c’est Noah. » Sa majesté descend du véhicule et viens me serrer la main. Nos regards vifs se jaugent pour savoir si la confiance est de mise.
« - C’est une bien belle deux-chevaux conservée que vous avez là. Je croyais que toutes les voitures avaient disparues après « l’autre temps ». Elle roule ? Elle démarre ? vous avez du carburant ?
- Ah un connaisseur, nos derniers visiteurs ne m’en ont pas parler. Oui nous arrivons à la démarrer, elle roule sûr. Mais nous n’avons pas d’essence, il n’y en a plus comme tu le sais. »Dit le vieux avec les étincelles dans les yeux. « Nous bricolons du nouveau carburant mais c’est pas au point. J’aimerai me mettre au volant pour me rappeler de bons souvenirs
- Mon grand-père en avait une et à la maison on avait de nombreuses photos de cette voiture. Je peux voir l’intérieur ? Avant le chambardement, j’ai toujours rêvé de voir à quoi ça ressemblait ?
- Ah ! bon ! non pas maintenant j’ai pas trop que ça à faire. Noah va te montrer ton logement et en quoi consiste le boulot. Nous te payons en nourriture, habitations, vêtements et un peu de cuivre.
- Oki merci, parfait.
- Noah file avec lui. »
Noah m’emmène et je découvre sous ses explications une exploitation à perte de vue, des hangars avec toutes sortes d’animaux assurant ainsi les réserves de nourritures, des cultures ; un luxe en ces temps difficiles et surtout une très grande autarcie. Tout est accessible sauf deux bâtiments en durs réservés aux habitants permanents dévolus à des travaux importants où l’on ne veut pas que l’on se marche dessus afin d’éviter les accidents. Donc ceux qui n'y travaillent pas n'ont pas accès.
Tout au long de la visite, il n’arrête pas de rouler des mécaniques en se donnant de l’importance tel un petit fonctionnaire de surveillance de musée faisant croire que tout est sous sa responsabilité, que seul lui détient toute la connaissance du fonctionnement de l’endroit.
Il m’emmène au fond de la propriété, une petite maison et une grange où j’entendais beugler. La petite habitation m’était dévolu, je devais garder le troupeau de la grange, les sortir les ramener pour la traite dont je ne devais pas m’occuper. La visite une fois faite il me donne rdv le soir à la cour de la deux-chevaux. Il me dit simplement en attendant de m’installer, de me reposer je commencerais le boulot demain.
Le soir venu, je débarque dans la cour, la deux-chevaux avait été rangée je ne sais où, de grandes tables sur tréteaux avaient été installées, assiette, verres, couverts et tout ce qu’il faut pour une tablée communautaire, le tout dans une lumière rosée du couché de soleil. Des femmes et des hommes de toutes âges, en tout je dénombrais une vingtaine de personnes. Une main se pose sur mon épaule, le patriarche dans une bonhommie revenue me présente tour à tour les personnes, leur nom, leur fonction. Le tout dans la vision choquante d’un déluge de nourritures, de boissons : choses dont je croyais avoir disparues dans notre « après ». on m’installe à un bout du « u » en compagnie des deux autres journaliers, histoires de bien montrés la différences de statut en ce lieu idyllique. Raymondo entretien des éoliennes, Léo stockage et transformation du lait Au fur et à mesure des échanges avec mes voisins je découvre le fonctionnement hiérarchisé d’une usine de survie organisée et autosuffisante au milieu d’un monde post apocalyptique et chaotique.
En m’endormant, je repense à ma chance d’arriver ici et l’idée peut-être de reprendre une vraie existence. Et mes paupières se fermaient lentement sur la seule question qui me taraudait : une deux-chevaux, qu’est-ce qu’on pouvait faire avec une deux -chevaux en ces temps reculée ?
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Tu n'as pas une âme, tu es une âme. Ce que tu as c'est un corps...