Pas provocateur pour deux sous, vous me connaissez, je rentrais un 20 février au matin dans un grand magasin avec une splendide pipe au bec. Il va de soi que la pipe, une écume imposante, était neuve et absolument vierge de tout brin de tabac. Evidemment, comme bien souvent, l'entrée du grand magasin se faisait par le rayon parfumerie et cosmétique. Il n'a fallu que quelques instant pour qu'une brave quarantenaire BCBG accompagnée de deux filles dans les 25 ans ne fasse une moue pincée avant de se diriger vivement vers un des vigiles placés à chaque entrée du magasin. Rassurée, sans doute, par la carrure imposante du black qui, après quelques messes basses, se mit en demeure de couper ma route elle lâcha, à l'attention de la cantonade un "Non mais ça pue ici, quel toupet ! ! !" Naturellement, quelques secondes plus tard, le black, à qui j'avais simplement montré le fond de ma pipe, s'écartait de mon chemin sans dire un mot. Décontenancée par l'attitude désinvolte du gardien, la toupie, remontée comme un coucou Suisse et flanquée de ses deux acolytes, se mit en devoir de faire bouclier de son corps à l’infâme butor qui osait ainsi braver impunément l'ordre établi . . . Protégeant son nez d'un blanc mouchoir elle se récrimina encore "Mais qu'est ce que ça pue son truc !" - "C'est insupportable !!!" - "Vous sentez ça, les filles ???" . . . Alors que je m'approchais d'elle nonchalamment, elle se raidit quelque peu, redressa d'un revers de la main un des plis de sa jupe, s'assura d'un bref coup d’œil de la présence de ses copines à ses côté et, maigre brindille résistant envers et contre tout à l'intolérable outrage, fit crânement face à mes 110 kg et ma face de dogue. Passant devant elle, je lançais un "Vous savez, ma pipe est vide."  "N'empêche, ça pue ! ! !" Me retournant, je lui montrais alors le foyer immaculé de ma pipe. Instantanément, elle saisit le bras de ses deux compagnes et se retournant, drapée dans sa dignité et sûre de son bon droit, fit feu des deux fuseaux.

Sidérant, mais l'idée m'a effleuré l'esprit plus d'une fois... Rien que de bourrer sa pipe après un bon repas au resto et les regards accompagnés de chuchotements se multiplient comme un vague d'indignation frémissante qui intérieurement est très jubilatoire, car tous courent là où je veux les faire trébucher... Là, je me lève et me taille... Une pipe  !!

Mais je l'ai déjà fait cher ami, c'est pourquoi je connais la sensation que cela me procure, mais aussi chez les autres qui fulminent déjà alors que je ne fume pourtant pas et que je ne compte pas le faire là  !