Les amis, je me permets de continuer mes retours de fumeries, cette fois-ci sur des tabacs qui ont déjà été abordés dans nos colonnes. Il s’agit des créations de la marque danoise My Own Blend. Cette enseigne a à son catalogue une grande variété de tabacs, dont certains forts originaux (on peut se régaler à la lecture du catalogue sur le site Danish Pipes Shop). Généralement vendus dans des boîtes métalliques de 100 grammes, ces mélanges arrivent toujours dans des conditions optimales de fumage. C’est précieux, car cela permet de se donner tout de suite un étalon de contrôle pour leur hygrométrie. Ces tabacs me donnent le sentiment d’être plus qu’honnêtes : jamais la moindre irritation, la moindre sécheresse de fond de gargante qui trahirait la présence de viles substances trop chimiques. Comme preuve supplémentaire à cela : ces tabacs peuvent sécher assez vite. Il convient d’en prendre soin. Je suis un fumeur régulier de 4 de leurs mélanges : le Sirius, le Lakrids, le Vanilla Snow et le Black D. Dans les jours qui viennent, je pense rendre compte dans le détail de chacun d’entre eux, et je vais commencer ici par celui dont je parlais il y a peu avec Norsum sur un autre fil : le Lakrids. Comme j’ai fait pour mon rapport sur le KN et le SG SE 2013, voilà où j’en étais en février dernier après quelques temps de première découverte (cf. page 1 de mon fil « Bonjour à la compagnie » de présentation) :

« Lakrids - Un tabac que j'ai envie de fumer toute la journée… le goût de réglisse est bien là, l'arôme de la fumée est extra, avec des pointes ici et là d'anis (mais pas tant que ça, ou alors c'est que c'est de l'anis étoilé peut-être). Je fume ça dans une pipe japonaise Tsutomu assez vieille, dont le tuyau courbe fin et un peu long est en train de verdir, mais qui est vraiment bien pour ce type de fumée. Faudra que j'essaye aussi dans une pipe plus courte pour voir. »

Comme pour le KN, je suis heureux de dire que la très forte impression que m’avait fait le Lakrids demeure encore maintenant, plusieurs mois après. Finalement, je n’ai jamais testé encore ce tabac dans une pipe faisant moins de 15,5cm de long. C’est tellement bon comme ça…

– tabac aromatique (réglisse/anis, et sans doute d’autres choses plus difficiles à cerner) vendu en boiboîte métal de 100g à couvercle métallique, obtenu via le site de vente en ligne Danish Pipes Shop ;

– c’est un tabac de puissance légère à moyenne, très délicat ;

– la coupe du tabac est souple, large, courte et visuellement, c’est magnifique : on dirait presque un mélange de thé de luxe. Le tabac doit rester humide pour garder ses arômes au maximum de leur potentiel. Je le stocke pour l’instant dans sa boîte d’origine, qui ferme bien, avec 4 sachets de 8 grammes Boveda 72%. À peine sec, c’est tout à fait fumable, mais on y perd déjà en délicatesse et complexité : par exemple, réglisse et anis cessent de « s’entrelacer » élégamment au fumage.

– Fumé dans des pipes de toute taille, toute contenance, mais plutôt assez longue : une Corona Tsutomu, une Genod de forme Diplomat, une Nørding légèrement courbée, une Larsen courbée, une Morel cutty light ; environ une vingtaine de bols depuis janvier (de volume variable, donc) jusqu’à aujourd’hui. Sur la photo ci-dessous, la boîte de Lakrids surmontée de ma Nørding.

Le nez dans le pot – dans lequel le tabac et tassé assez fortement – l’accueil est splendide. Ce n’est ni complètement réglisse, ni complètement anis. Certes, on tend plus vers une odeur réglissée, mais le tout petit picotement qu’on a sur les parois intérieures du nez, à mon avis, c’est l’anis. Ah, un détail : quand je dis le nez dans le pot, je mets vraiment mon nez dans le tabac, et je fais dedans 4 ou 5 inspirations/expirations. Je fais ça avec tous mes tabacs, et ça révèle remarquablement bien de quoi le mélange est fait. Ici, peu de sucre, une belle réglisse « poivrée » à l’anis. Et en fond, une légère âcreté naturelle qui vient du tabac. Tout ce que j’aime donc : on sent le tabac, on sent la réglisse, mais cette dernière est légère, et rehaussé d’anis pour mettre du relief. Tout ceci s’enlace remarquablement et donne un mélange magnifiquement équilibré. Accessoirement, on sait d’emblée qu’au fumage on ne va pas se retrouver avec la bouche et la langue anesthésiées par une infâme sauce à la réglisse. C’est un produit fait par de vrais amateurs d’anis et de réglisse. Pas un cache misère pour un tabac infect. C’est rare de « sentir » aussi clairement la qualité. Bienvenue dans le monde des aromatiques de chez My Own Blend.

Note particulière : ce tabac se charge remarquablement bien (et c’est pas parce qu’il est anisé que je dis ça ). Vous me direz qu’il suffit de ne pas s’y prendre avec les pieds pour bien bourrer une pipe… Mais non ! Non, ce que je veux dire, c’est que la coupe large et courte du mélange, fait qu’on arrive à disposer le tabac de manière très précise, méthodique, idéale dans le fourneau de la pipe, et qu’on n’en fout pas partout à côté (j’aime bien charger ma pipe de manière assez généreuse et avec de larges gestes – donc j’en fiche partout en temps normal).

Du coup, qui dit pipe chargée aux petits oignons (oui, bon… vous m’avez très bien compris, hein !), dit tabac qui s‘allume très bien. La mise à feu se passe bien, mais il ne faut pas hésiter à y aller franco côté allumage : une fois les brins larges bien allumés, pas de problème, mais il faut bien les soumettre à la flamme pour y arriver. Dit comme ça, cela peut faire peur, mais n’ayez crainte : pas de fumée vindicative. Quelque chose de vaporeux et de doux, plutôt. Les premières sensations en bouche sont également celles d’une douceur très élégante. Pas du sucre, mais une douceur soyeuse, fraîche. À aucun moment de sa combustion ce tabac sera-t-il agressif ou râpeux. Au bout de l’allumage, quand la température retombe, on perçoit alors cette signature de réglisse anisée très légère mais bien nette qui donne son nom au mélange.

Tout ce petit monde se consume idéalement pour un moment de détente : ça brûle plutôt lentement. Le goût en bouche est délicat, jamais les papilles ne sont saturées. Certes, on a cette sensation de bouche réglissée/anisée que l’on connaît lorsque l’on peut boire un pastis, mais jamais, et c’est là une grosse différence, au point de perdre l’usage de nos sens olfactif et gustatif. L’équilibre est assez extraordinaire de ce point de vue. Concrètement, cela veut dire qu’au bout d’une pipe à fourneau de 21mm sur 45mm, ni la langue ni la bouche ne ressentent la moindre fatigue. Et tout ça reste assez égal du début à la fin de la pipe. Comme de bien entendu, ça forcit un peu à mesure qu’on descend dans le foyer, mais pas au point de faire prendre au tabac une autre identité.

Tout cela laisse une odeur plutôt discrète et assez fraîche dans la pièce, pas très persistante.

La conclusion, c’est que c’est somme toute un tabac vraiment classieux. Il peut être fumé vraiment à tout moment de la journée, sans crainte d’une tarte de nicotine dans la fraise (laquelle n’est pas franchement perceptible d’après mon expérience). J’ai une petite préférence pour fumer le Lakrids après le repas de midi. Je ne sais pas si c’est parce que pour moi la réglisse est liée à ses vertus digestives, mais je trouve que c’est assez naturel comme choix de moment.

Est-ce que j’en rachèterai ? Oui, absolument. C’est vraiment un tabac exceptionnel de par sa qualité ET son originalité.